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25 Avr. 2024

Alban Pousset-Bougère, bâtonnier de Lyon : Renforcer les interactions pour développer une meilleure démocratie ordinale

Alban Pousset-Bougère, bâtonnier de Lyon : Renforcer les interactions pour développer une meilleure démocratie ordinale
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Temps de lecture : 3min

Bâtonnier de Lyon depuis janvier 2024, au côté de la vice-bâtonnière Sara Kebir, Alban Pousset-Bougère est aujourd’hui notre invité pour aborder les grandes thématiques de son programme dédié au premier Barreau de province. Unies par la promesse de “raviver les liens”, les propositions du nouveau bâtonnier couvrent l’ensemble des défis de la profession, de la déontologie à la vie quotidienne, en passant par l’environnement, l’IA et la collaboration interprofessionnelle.

Dans votre programme vous parlez, de « raviver les liens ». Comment vos mesures pourront favoriser une meilleure communication et d’avantage d’interactions au sein de la profession ; dans quelle mesure seront-elles mises en œuvre tout en respectant la confidentialité nécessaire ? 

Nous avons constaté avec la vice-Bâtonnière Sara Kebir que les avocats connaissent mal le travail réalisé pour eux par ceux qui s’investissent dans les institutions ordinales.

Afin d’attirer le plus grand nombre et pour aller encore plus loin que nos prédécesseurs, nous avons proposé de communiquer plus encore sur ce travail.

A Lyon, outre les 24 membres du Conseil de l’Ordre, des avocats animent 49 commissions, dont certaines traitent des questions dites « régaliennes », comme l’admission au Barreau, la déontologie, les contrôles de comptabilité, de formation, de respect des règles de lutte contre le blanchiment. Les autres sont plus thématiques et ont pour objet d’aider les confrères à réfléchir et prendre du recul sur leur domaine d’intervention.

Quel dommage donc que ces travaux ne soient connus que des 400 avocats sur 4000 qui composent le Barreau de Lyon, premier Barreau de province.

La première mesure de notre mandat a ainsi été de proposer au Conseil de l’Ordre de rendre publics les débats du conseil de l’Ordre à Lyon, pour que chaque avocat puisse y assister, dans une salle de retransmission attenante. Ces débats sont en effet souvent riches sur l’évolution de la profession et ses problématiques ainsi que sur le rôle sociétal du Barreau. Ils se nourrissent aussi d’auditions régulières de personnalités extérieures. L’objectif est qu’ils puissent bénéficier à tous.

Bien entendu, le conseil conserve une partie non-publique pour conserver la confidentialité nécessaire aux seuls débats relatifs aux questions de discipline et qui relèvent d’enjeux personnels de tel ou tel avocat.

Nous mettons également en ligne, après chaque conseil de l’Ordre, une petite vidéo d’1’30, reprenant les grands points débattus.

Chaque mois, nous organisons un Live avec des présidents de commissions, pour que chaque avocat intéressé puisse comprendre quels sont les travaux de chaque commission, ses projets et leur poser des questions.

Nous allons enfin rendre compte chaque trimestre, par un tableau de bord de l’Ordre, des chiffres de l’activité de la maison, du nombre de saisines de la commission collaboration par exemple, ou du nombre de dossiers disciplinaires en cours.

Renforcer l’interaction permet ainsi le développement d’une meilleure démocratie ordinale. Elle suscite l’intérêt et, nous l’espérons, la participation et l’adhésion du plus grand nombre.

Votre programme propose des mesures concrètes pour améliorer la vie quotidienne des avocats, comme l’attention portée aux avocats en situation de handicap et l’optimisation de la taxation des honoraires. Pouvez-vous expliquer comment ces initiatives contribueront à améliorer le bien-être et l’efficacité des avocats dans leur pratique quotidienne, et quelles seront les premières étapes pour les mettre en œuvre ?

Au-delà des grands débats de société qui animent naturellement la profession d’avocat, il est de notre devoir de servir au mieux nos confrères et de faciliter leur exercice professionnel quotidien.

En ce qui concerne les confrères en situation de handicap, nous avons mis en place un groupe de travail pour tenter de trouver une solution la plus discrète possible, pour que, notamment lorsque ce handicap est invisible, ils puissent bénéficier d’une priorité de passage en audience, sans avoir à demander à qui que ce soit, ni consulter leur confrère adverse, et encore moins devant leur client.

Cette discrétion absolue complexifie considérablement les choses, mais je ne doute pas que l’intelligence collective nous permettra de trouver les bonnes solutions.

En revanche, dès le début de notre mandat, nous avons fait inscrire dans notre règlement intérieur une priorité de passage pour nos consœurs en état de grossesse. Même si elle s’opère déjà naturellement en général, nous avons souhaité la rendre définitive et indiscutable. C’est aussi une mesure de simplification et de clarification dans les relations entre confrères et avec les magistrats.

De la même manière, pour régler au plus vite les questions de taxation d’honoraires, qui proviennent aux 2/3 des avocats impayés et pour 1/3 de contestations de leurs clients, pour 600 à 800 décisions à rendre par année. Nous retravaillons le process pour le rendre plus efficient et plus rapide. Nous le devons à nos confrères qui sont alors en attente du règlement des sommes en question.

S’occuper du quotidien des avocats fait partie de nos attributions et nous y sommes attachés avec Sara Kebir.

Vous proposez d’encourager la collaboration libérale et d’améliorer les relations entre confrères, ainsi que de favoriser la collaboration interprofessionnelle. Quels sont les défis spécifiques que vous anticipez dans la mise en œuvre de ces initiatives et comment comptez-vous surmonter ces obstacles pour créer un environnement de travail plus collaboratif et inclusif pour les avocats ? 

La collaboration libérale est un mode d’exercice qui a l’avantage de permettre à l’avocat libéral de s’assurer un minimum de revenus issus d’un cabinet, tout en développant sa clientèle personnelle en vue de son installation. Elle n’est pas exclusive d’autres modes d’exercice, comme la sous-traitance, ou le salariat. Elle doit en tous cas être appliquée de manière équilibrée entre les parties et le Bâtonnier est là pour y veiller.

Le cabinet se doit notamment d’assurer, en plus d’une rémunération et d’une mise à disposition de locaux en vue du développement de la clientèle personnelle du collaborateur, une formation quotidienne sur les éléments pratiques, économiques, déontologiques de la profession. C’est un enjeu essentiel, compte tenu des allers-retours des avocats vers d’autres modes d’exercice du droit, comme le salariat en entreprise par exemple, qui doit nous interroger.

Nous le savons, entre 25 et 30% des avocats quittent la profession dans les 10 premières années de barreau. Attirer les jeunes talents vers le barreau, dès l’université et organiser leur exercice professionnel pour qu’ils gardent l’envie de s’y épanouir tout au long de leur carrière, constitue un enjeu essentiel pour le Barreau.

Dans une période en tension, où certains préfèrent une liberté totale et un équilibre vie professionnelle-vie personnelle plus évident que pour les générations précédentes, et où d’autres au contraire souhaitent plus de sécurité dans leur exercice professionnel et sont défiant à l’égard de l’exercice libéral, les cabinets doivent s’adapter. Cette réflexion est menée par la profession, que ce soit par le Conseil national des barreaux, mais aussi à Lyon.

Vous faites référence à plusieurs reprises aux questions déontologiques dans votre programme. Que souhaitez-vous prioritairement faire évoluer ?

En matière de déontologie, outre les questions relatives à l’exercice de la collaboration, dans l’équilibre évoqué plus haut, nous souhaitons, avec Sara KEBIR, assurer la protection des avocats, quel que soit leur âge, leur sexe, leurs conditions d’exercice, contre la discrimination et le harcèlement notamment.

Le Barreau s’est déjà doté d’outils performants et discrets en la matière. Nous avons cependant renforcé ce dispositif en mettant en place une permanence du Bâtonnat, tous les jeudis matin, qui permet à chaque avocat de nous rencontrer, sans le filtre de la prise de rendez-vous. Un accès direct et immédiat au Bâtonnier. Ce sont ainsi plusieurs confrères qui viennent nous rencontrer, pour des difficultés très diverses et quotidiennes, que nous nous efforçons de régler, si possible, dans les meilleurs délais. 

En outre, le développement des réseaux sociaux rend nécessaire un approfondissement  de notre déontologie sous cet angle. Nous sommes en effet passés de l’interdiction de toute publicité jusqu’en 2005, aux pratiques d’une communication devenue parfois exacerbée, immédiate, voire racoleuse. Elle peut mettre en danger nos clients par des violations du secret professionnel, même non volontaires, par négligence.

En cette matière, comme d’ailleurs dans d’autres, et conformément à notre serment, la prudence et la délicatesse doivent être la règle d’or. Nous allons donc proposer au conseil de l’Ordre de créer une sous-commission « Déontologie 3.0 » pour réfléchir et affiner ces questions. Elle proposera un guide et assurera des formations régulières.

Face aux défis environnementaux actuels, votre programme souligne l’importance d’une approche éco-responsable au sein de la profession d’avocat, notamment par la création d’un label pour les cabinets engagés et la promotion d’une politique RSE globale. Comment envisagez-vous d’encourager et de soutenir concrètement les cabinets dans cette transition vers plus de durabilité, et quel rôle le Barreau doit-il jouer dans ce domaine ?

Le Barreau doit être à l’écoute des avocats et les aider à réaliser leur transition écologique. A cet effet, nous avons d’ores et déjà crée une commission « Barreau Vert », qui va travailler à proposer des mesures concrètes à mettre en place dans les cabinets. Il ne s’agit pas d’un « green waching » mais bien d’une transformation en profondeur de nos modes d’exercice.

Comme tous les citoyens, les avocats sont déjà engagés dans ce travail au quotidien, mais les habitudes, les contraintes que cela peut représenter, le manque de temps pour y réfléchir, concentrés qu’ils sont sur la défense des intérêts de leurs clients, constituent des freins qu’il faut desserrer. C’est l’objectif de cette nouvelle commission.

Par ailleurs, nous avons remarqué que dans les appels d’offre, les cabinets sont interrogés sur leur politique RSE. C’est maintenant un critère de sélection des offres. Afin d’aider les plus petits cabinets à y répondre, eux qui n’ont pas les mêmes moyens que les plus gros pour développer ces politiques, nous allons mettre en place un label éco-responsable, qui sera décerné, selon un certain nombre de critères prédéterminés. Une partie du travail sera ainsi réalisé. Ils pourront surtout, avec ce label, justifier de leur préoccupation en la matière et concourir sans être désavantagés.

Évidemment, l’Ordre des avocats doit donner l’exemple, et nous avons pris l’engagement, notamment, de proscrire l’avion dans les déplacements ordinaux pouvant être réalisés en moins de 3 heures en train, c’est-à-dire leur immense majorité.

Concernant l’adoption et l’intégration des technologies numériques et de l’intelligence artificielle dans la pratique des avocats, vous avez souligné l’importance de la formation continue et du partage des connaissances. Pouvez-vous détailler vos premières actions pour promouvoir et faciliter cet apprentissage continu pour tous les avocats, et comment vous envisagez d’assurer que les outils numériques soient utilisés de manière éthique et en conformité avec les réglementations ?

La profession d’avocat ne disparaîtra pas avec l’IA. Elle se recentrera sur son cœur de métier : la relation humaine et sociale, que ce soit entre particuliers, ou au sein de l’entreprise. Aussi, l’intelligence artificielle ne doit pas faire peur aux avocats, elle doit être un outil au service de l’avocat. 

Nous disposons d’ores et déjà dans notre pratique de nombreux outils, qui nous permettent d’optimiser les recherches documentaires. Grâce à l’IA générative, se sont de nouveaux pans de productivité qui peuvent être explorés, tout en conservant la maîtrise du dossier. L’humain restera à la base des négociations, de la stratégie, de la bonne psychologie du dossier ce qui fait l’essentiel de la profession d’avocat.

Pour promouvoir des innovations indispensables à ces évolutions, et faire en sorte qu’elles viennent de l’intérieur et soient au service de la profession, nous venons de clôturer notre deuxième concours de l’Innovation, qui a récompensé 4 très beaux projets, sur 30 qui nous avaient été présentés. C’est la vitalité et le réalisme du Barreau. Il est innovant et prépare l’avenir. 

Mais les évolutions sont tellement rapides qu’il est de notre devoir aussi de former les avocats pour qu’ils ne soient pas dépassés et qu’il ne se créée pas une fracture générationnelle entre eux. Chacun n’a pas la même agilité dans ces matières, mais doit pouvoir, demain, travailler avec les bons outils.

Il faut aussi être vigilant quant à la sécurité informatique et nous avons de nombreuses mesures qui vont se mettre en place dans les prochaines semaines, que ce soit l’adresse avocat.fr, installée par le CNB dès le 14 mars dernier, et que nous envisageons de rendre obligatoire pour tous les avocats du Barreau de Lyon. Une adresse sécurisée constitue la base d’une protection minimale. Une fois cette première étape réalisée, nous pourrons nous remettre à la recherche d’assurances cyber à la fois protectrice et à un coût raisonnable, pour les membres du Barreau de Lyon.